Bernard Cazeneuve a été nommé au Ministère de l’Intérieur le 2 avril dernier. Son arrivée, place Beauvau, a suscité des réactions assez mitigées des organisations syndicales.
Elles lui reprochent, en autre, ses coupes budgétaires débouchant sur la suppression de l’indemnité de sujétion spéciale (ISS) dont bénéficiaient les plus jeunes policiers.
Les chantiers à mener au sein du Ministère restent gigantesques. D’abord, le projet de loi sur la réforme pénale que les policiers souhaiteraient voir abandonner rapidement. Seulement, le maintien de Christiane Taubira au Ministère de la Justice n’est pas nécessairement un bon signal pour les policiers. Les professionnels espèrent un soutien du prédécesseur de Bernard Cazneuve, Manuel Valls, aujourd’hui, Premier des Ministres. Le nouveau locataire de la place Beauvau devra ferrailler contre une Ministre plus populaire que lui.
Ensuite, la réforme des services de renseignements au travers de la nouvelle DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) qui sera « chargée, sur l’ensemble du territoire de la République, de rechercher et d’exploiter le renseignement intéressant la sécurité nationale ou les intérêts fondamentaux de la Nation ». Elle remplacera la DCRI (Direction centrale du renseignement intérieure).
Cette nouvelle direction sera dotée de quatre directions et services : une « direction du renseignement et des opérations », une « direction technique », un « service de l’administration générale » et une « inspection générale de la sécurité intérieure ». L’enjeu reste important car les services doivent s’adapter aux mutations de la délinquance. La création d’une sous direction pour la lutte contre la cybercriminalité répond à une attente très forte des entreprises comme des citoyens. Il reste, néanmoins, un travail de fond devant permettre une analyse rapide et efficace des renseignements collectés. La création de 405 postes au sein de la DGSI devrait permettre d’atteindre cet objectif à la seule condition de diversifier les profils.
Ensuite, la réforme du Livre VI du code de la sécurité intérieure attendue depuis mars 2014 n’a toujours pas été examinée au Parlement. Cette réforme importante pour la sécurité privée doit permettre une meilleure condition d’exercice de sécurité intérieure. La réforme de la loi du 12 juillet 1983 soutenue pour les professionnels de la sécurité privée semble bloquée. Le départ récent du Préfet Blanchou chargé des questions de sécurité privée au Ministère de l’Intérieur n’accélèrera pas le processus.
Parallèlement à ces réformes, le nouveau ministre de l’intérieur devra accompagner le développement quelques fois anarchique de la vidéoprotection et de l’ensemble des dispositifs utilisant les voies de communication électronique sous le contrôle de la CNIL (Commission nationale d’information et des libertés). Comme l’indiquait le professeur Xavier Latour, « le droit est en retard sur la technologie ».
Enfin, le rapprochement entre la police et la gendarmerie nationales initié depuis plusieurs années se fait de plus en plus pressent à l’heure où le gouvernement cherche des pistes d’économie. Mohamed Douhane, du syndicat synergie officier a appelé lors de son audition à l’Assemblée Nationale le 16 avril dernier à la fusion des deux services. Il a indiqué à cette occasion que « La question se pose aujourd’hui de savoir si le maintien de ces deux institutions ne génère pas du gaspillage budgétaire et du gaspillage en termes d’énergie ».
C’est beaucoup de chantiers qu’il faut mener de front en ayant en ligne de mire la sécurité des biens et des personnes. Le nouveau Ministre de l’Intérieur, avocat de profession, semble disposer de quelques atouts pour conduire ses réformes profondes dont les professionnels de la sécurité ont besoin pour améliorer un service public de sécurité de qualité.